Nucléaire – l’interminable confrontation entre la France et l’Allemagne

VnExpressVnExpress01/08/2023


Alors que l'Union européenne élabore un projet de loi pour limiter la volatilité des prix de l'électricité, la France s'oppose à l'Allemagne sur l'avenir du nucléaire.

Le projet de loi de réforme du marché de l'électricité élaboré par la Commission européenne pose un défi majeur à la modernisation du parc nucléaire français. Le pays a donc envoyé des documents pour persuader la Commission de prendre en compte ses problèmes, mais il a dû faire face à une opposition farouche de la part de l’Allemagne et de ses alliés.

Même les alliés nucléaires traditionnels de la France, le bloc de l’Est et la Finlande, affichent un soutien prudent. La France tente de rallier des soutiens d'autres pays avant les vacances d'été mais cela reste assez fragile, selon des sources du Monde .

Après la flambée des prix de l'énergie à l'été 2022 en raison du conflit ukrainien, la Commission européenne a présenté le 14 mars un projet de loi visant à limiter la volatilité des prix de l'électricité, à condition qu'ils soient décarbonés.

Le projet de loi permettrait aux États membres de subventionner la production d’énergie sur leur territoire, qu’elle soit issue de sources renouvelables ou nucléaires, sans violer la législation sur les aides. Cela permettrait également aux pays d’augmenter soudainement les tarifs imposés aux producteurs d’électricité lorsque les prix augmentent.

De la vapeur s'élève des tours de refroidissement de la centrale nucléaire de Bugey à Saint-Vulbas, dans le centre de la France, le 20 juillet. Photo : AFP

De la vapeur s'élève des tours de refroidissement de la centrale nucléaire de Bugey à Saint-Vulbas, dans le centre de la France, le 20 juillet. Photo : AFP

Pour l’Allemagne et ses alliés comme le Luxembourg et l’Autriche, la France ne peut pas utiliser la nouvelle loi pour financer des modernisations visant à prolonger la durée de vie des centrales nucléaires. "Berlin panique parce que son industrie perd en compétitivité. Ils veulent maintenir les prix de l'électricité à un niveau élevé pour que la France ne profite pas du nucléaire", explique un diplomate pro-nucléaire.

L'Allemagne, avec son nombre croissant de projets d'énergies renouvelables, soutient le mécanisme proposé par la Commission pour subventionner la construction de nouvelles centrales électriques. Les alliés de la France – des pays dépourvus d'énergie nucléaire à grande échelle – s'intéressent à la manière de financer de nouvelles centrales. En conséquence, «Paris risque de se retrouver isolé dans son combat», explique une source.

Lors du Conseil européen des 29 et 30 juin, le chancelier allemand Olaf Scholz et le président français Emmanuel Macron ont discuté de la question mais ne sont pas parvenus à un consensus. Ils avaient prévu d'en rediscuter le 3 juillet, en marge de la visite d'Etat du président français en Allemagne. Cependant, l'Elysée a été contraint d'annuler ce voyage en raison des émeutes survenues après la mort de la jeune fille Nahel. Depuis lors, les discussions entre les deux pays n’ont progressé nulle part.

Ne voulant pas que la France profite du nouveau projet de loi, l'Allemagne souhaite également davantage de subventions sur les coûts de l'électricité pour ses industries à forte intensité énergétique. Ils prévoient de déployer un plan de 30 milliards d’euros d’ici 2030, mais cela nécessiterait l’approbation de la Commission européenne et ne serait pas conforme aux règles actuelles. « En Allemagne, l'énergie repose en grande partie sur les combustibles fossiles. Cela n'entre pas dans le champ d'application du projet de réforme du marché de l'électricité de la Commission », a ajouté la source.

La France perd également du terrain au Parlement européen, où la commission de l'industrie a amendé le 19 juillet son projet de réforme, rendant plus difficile le soutien de l'État aux centrales nucléaires. "La France a perdu en commission Industrie, mais la bataille va se rejouer en plénière de septembre et surtout au Conseil européen", a déclaré Pascal Canfin, président de la commission Environnement du Parlement européen.

Depuis que Berlin a décidé de sortir progressivement du nucléaire après la catastrophe de Fukushima en 2011, la France et l’Allemagne sont en désaccord sur le sort de l’énergie atomique en Europe. Il s’agit d’une guerre économique, politique et diplomatique sans fin, aggravée par le réchauffement climatique et le conflit en Ukraine.

Cette confrontation porte sur une série de projets de loi européens différents, destinés à décarboner l’économie européenne, à accroître l’indépendance énergétique et à prévenir les pics de prix de l’électricité comme l’année dernière.

Parfois, Paris remporte une manche, comme dans le débat acharné sur l’intégration de l’énergie nucléaire dans la catégorie verte et son étiquetage pour guider l’investissement privé. Mais à d’autres moments, Berlin a le dessus, comme avec un projet de loi présenté par la Commission européenne le 16 mars pour soutenir le développement d’une industrie décarbonée en Europe. Le projet de loi doit encore être négocié au Parlement européen et entre les 27 États membres, mais les premières démarches ne sont pas en faveur de Paris.

Pourtant, les Européens parviennent souvent à des compromis complexes qui permettent aux deux parties d’obtenir plus ou moins que ce qu’elles souhaitent. Prenons par exemple le cas de la « directive sur les énergies renouvelables ». Cette politique prévoit que d’ici 2030, 42,5 % de l’approvisionnement énergétique de l’Europe proviendra de l’énergie éolienne et solaire. Adoptée mi-juin après d'intenses débats, la directive permet enfin à la France de prendre en compte l'hydrogène produit à partir du nucléaire dans la mesure de l'énergie verte du pays.

Phien An ( selon Le Monde )



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