Cette visite intervient moins de trois semaines après que le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin a prononcé un discours critiquant la Chine lors du récent dialogue Shangri-La. Dans un discours prononcé ultérieurement lors du Dialogue Shangri-La, le ministre chinois de la Défense Li Shangfu a répondu aux États-Unis avec de nombreuses critiques acerbes. Avant la tenue de la conférence, Pékin a rejeté la proposition de Washington selon laquelle les ministres de la Défense des deux parties tiendraient des discussions en marge de l'événement.
Le président Joe Biden et le président Xi Jinping se rencontrent à Bali, en Indonésie, en novembre 2022
De plus, un certain nombre d’incidents entre les armées des deux pays ont eu lieu récemment, tant dans les airs qu’en mer, ce qui représente de nombreux risques potentiels pour la paix et la stabilité dans la région. Ces dernières années, les relations entre les États-Unis et la Chine se sont détériorées, avec de nombreux désaccords sur la mer de Chine méridionale, Taïwan et même la guerre en Ukraine. Le conflit commercial entre les deux parties s’est également intensifié et ne montre aucun signe d’arrêt.
Dans un tel contexte, la visite du secrétaire d’État Blinken en Chine suffira-t-elle à « apaiser » les tensions afin que les deux parties puissent « faire la paix » l’une avec l’autre ? Pour répondre à cette question, certains experts internationaux ont donné leur avis dans une interview avec Thanh Nien juste avant la visite.
Il est difficile d’être optimiste.
L’administration Biden souhaite ouvrir des canaux de communication avec la Chine pour cibler les domaines dans lesquels les deux parties peuvent coopérer et éviter les conflits involontaires. Mais il est difficile d’être optimiste lorsque M. Qin Gang, le ministre chinois des Affaires étrangères, continue de blâmer les États-Unis pour tous les problèmes. Je pense que la plupart des voisins de la Chine aimeraient voir une approche plus constructive et pragmatique de la diplomatie américano-chinoise.
Dr. Patrick M. Cronin (Président de la sécurité Asie-Pacifique, Hudson Institute, États-Unis)
Ouvrir des opportunités
Cette visite offre aux deux parties l’occasion d’apaiser les tensions. Même si les chances d’une percée sont faibles, le rétablissement du contact ouvrirait la porte à un échange de vues plus clair et permettrait de progresser vers des pourparlers qui réduiraient les tensions.
Dr. Timothy R. Heath (expert en recherche senior, RAND Corporation, États-Unis)
De petites concessions peuvent être possibles.
La visite du secrétaire d’État Blinken en Chine est un nouvel effort pour stabiliser des relations bilatérales chancelantes. La visite était initialement prévue en février mais a été reportée sine die après qu'un ballon chinois a été détecté et abattu au large des côtes américaines.
La raison est que Washington l’a accusé d’être un ballon espion.
Le récent sommet du G7 a réaffirmé la solidarité des États-Unis avec le Japon, la Corée du Sud, les alliés européens et un certain nombre de partenaires. Beaucoup évoquent un isolement diplomatique de la Chine et de la Russie.
La Chine et la Russie ont contré la démarche du G7 en utilisant le groupe BRICS pour défier l'Occident et ont laissé le dollar confronté à des inquiétudes à certains moments en raison de désaccords politiques internes aux États-Unis sur une solution au plafond de la dette.
Le programme diplomatique de Blinken a désormais trouvé de la place pour un nouvel effort et pour éviter une nouvelle spirale descendante dans les relations. Mais il est difficile d’espérer que les deux parties parviennent à un consensus alors que les récents commentaires de Pékin sur Ryukyu (le royaume indépendant qui gouverne Okinawa) ont contrarié Tokyo.
Dans un contexte de tensions croissantes, les États-Unis et la Chine sont susceptibles de présenter de petites concessions comme des succès majeurs. Peut-être que l’assouplissement des restrictions sur le commerce des puces semi-conductrices de faible technologie avec la Chine sera un « souvenir » du secrétaire Blinken.
Professeur Yoichiro Sato (expert en relations internationales, Université Ritsumeikan Asie-Pacifique, Japon ; Senior Fellow, Yusof Ishak Institute of Southeast Asian Studies, Singapour)
Éviter l’escalade des conflits
Le voyage du secrétaire d’État Blinken s’inscrit dans le cadre des efforts américains visant à ouvrir des ponts de communication pour contrôler la concurrence avec la Chine afin d’éviter une escalade vers le conflit. S'exprimant lors du Dialogue Shangri-La qui s'est tenu début juin à Singapour, le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin a également souligné cette priorité.
Apparemment, la Chine est disposée à rouvrir les ponts de communication avec les responsables économiques et diplomatiques américains, mais reste réticente à parler avec les responsables américains de la défense et de l’armée. Cette réalité est lourde de dangers, car la fréquence des affrontements aériens et maritimes dangereux entre les deux parties a récemment augmenté.
M. Gregory Poling (Directeur du programme Asie du Sud-Est, Directeur de l'Initiative pour la transparence maritime en Asie - AMTI, Centre d'études stratégiques et internationales - CSIS, États-Unis)
Opportunité importante
Cette visite est une occasion importante de chercher à stabiliser les relations entre les États-Unis et la Chine, un objectif commun que le président chinois Xi Jinping et le président américain Joe Biden ont convenu de considérer comme un objectif commun lorsque les deux dirigeants se sont rencontrés en marge du sommet du G20 en Indonésie en novembre 2022. Je pense que le meilleur scénario serait que cette visite contribue à empêcher une nouvelle détérioration des relations, mais une amélioration des relations est peu probable.
Les deux parties devraient profiter de cette occasion pour clarifier leurs intentions, résoudre leurs désaccords et communiquer leurs préoccupations. Je ne m'attends toutefois pas à des résultats décisifs, mais il est possible que les deux parties prennent davantage d'engagements l'une envers l'autre lors de visites ultérieures, comme par exemple celle de la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen ou celle de l'envoyé spécial du président américain pour le changement climatique John Kerry à Pékin.
Mme Bonnie S. Glaser (Directrice du programme Indo-Pacifique, German Marshall Fund aux États-Unis)
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