L’élection présidentielle russe est l’occasion pour M. Poutine d’affirmer son pouvoir, mais aussi d’envoyer un message de confrontation dure avec l’Occident.
"Qui contribuera à assurer le développement ? Qui assurera la stabilité ? Qui pourra unifier le pays ? Et en qui placez-vous votre confiance ?", s'interrogeait le présentateur dans une vidéo diffusée à la télévision d'Etat russe à l'approche de l'élection présidentielle.
« Seulement lui », a répondu la personne alors que des images du président Vladimir Poutine apparaissaient à l’écran, le montrant en train de travailler dans son bureau, accueilli par la foule ou marchant sur un tapis rouge pour rencontrer des dirigeants asiatiques et arabes.
Ce message a été transmis au cours des derniers mois : M. Poutine est le seul à pouvoir unir et diriger la Russie contre les actions hostiles de l’Occident.
En février, au lieu de faire campagne ou de débattre à la télévision, M. Poutine a visité une usine de défense et est monté dans le cockpit d'un bombardier Tu-160M à capacité nucléaire. Lui et son équipage ont effectué un court vol sur ce bombardier stratégique.
M. Poutine dans le cockpit d'un bombardier Tu-160M le 22 février. Vidéo: Kremlin
L'image rappelle M. Poutine montant dans le cockpit d'un avion de chasse Su-27 et volant avec le pilote au-dessus d'une zone de guerre jusqu'à la capitale Grozny de la République tchétchène en mars 2000, près d'une semaine avant l'élection présidentielle russe. L'image de Poutine en tant que dirigeant dur pendant la deuxième guerre de Tchétchénie a renforcé sa popularité, lui permettant de remporter une victoire écrasante aux élections du 26 mars 2000.
Dans son discours sur l'état de l'Union du 21 février, il s'est vanté des capacités nucléaires de la Russie et a mis en garde contre un conflit nucléaire si les pays occidentaux envoyaient des troupes intervenir directement dans la guerre en Ukraine. Dans une interview à la télévision russe le 12 mars, M. Poutine a une nouvelle fois évoqué la possibilité d'une confrontation nucléaire.
« D'un point de vue militaro-technique, nous sommes bien sûr prêts. Nos forces nucléaires sont toujours en état de préparation au combat », a-t-il déclaré.
Les observateurs estiment que confronter l’Occident et maintenir les valeurs russes traditionnelles est l’approche à long terme choisie par M. Poutine.
« Une confrontation géopolitique à grande échelle avec l’Occident est désormais la force de la Russie », a déclaré Samuel Greene, chercheur au Center for European Policy Analysis à Washington. « Ce dont Poutine a besoin, c’est que l’Occident joue ce jeu. Il a besoin que l’Occident se méfie de tout ce qui est russe. Il a besoin que l’Occident le rejette, lui mais aussi les Russes ordinaires. »
C’est la raison pour laquelle M. Poutine prend l’élection présidentielle si au sérieux, même s’il est presque certain de la gagner, disent les observateurs. L’élection est l’occasion pour M. Poutine d’amplifier son message à l’Occident, tout en démontrant sa position forte dans la politique russe.
Le président russe Vladimir Poutine lors d'une interview à la télévision russe le 12 mars. Photo : Zuma Press
Les adversaires de M. Poutine aux élections sont le chef du Parti libéral-démocrate de Russie, Leonid Sloutski, le député Vladislav Davankov et le député Nikolaï Kharitonov. Ces personnes ont toutes des opinions pro-Kremlin et leur présence sur le bulletin de vote semble renforcer encore davantage la position de M. Poutine.
« Ce qui importe avant tout au Kremlin, c'est un taux de participation élevé », a déclaré Nikolai Petrov, membre du groupe de réflexion Chatham House, basé au Royaume-Uni. « Ce taux et le nombre de voix pour M. Poutine doivent dépasser le chiffre de 2018, pour montrer le soutien du peuple à son égard en temps de guerre, au milieu de nombreux défis de la part de l'Occident. »
Le taux d'approbation de Poutine auprès des électeurs lors du scrutin de 2018 était de 67,5 %. Cette année, pour la première fois, la Russie a organisé des élections présidentielles sur trois jours, au lieu d'un seul comme auparavant, afin de donner plus de possibilités aux citoyens de voter.
Les électeurs russes ont voté à Novossibirsk, en Sibérie, le 15 mars. Photo : AFP
C'est aussi la première fois que les Russes peuvent voter en ligne pour élire leur président, une mesure que M. Poutine considère comme « très pratique ». Plus de 94 000 bureaux de vote seront ouverts à travers le pays, y compris dans quatre régions récemment annexées à l'Ukraine par la Russie.
M. Poutine n’a participé à aucune activité électorale comme d’autres opposants. Au lieu de cela, il fait passer le message à travers l'agenda quotidien du président, comme les réunions avec des groupes de jeunes et la création de programmes de développement avec des représentants du gouvernement.
Les observateurs estiment que M. Poutine n’a probablement pas non plus besoin d’événements de campagne. Le Centre Levada, un institut de sondage réputé en Russie, a déclaré le mois dernier qu'environ 86 % des personnes approuvaient le travail de M. Poutine en tant que président. Ce taux de soutien est en hausse de 6 % par rapport à un sondage similaire réalisé en septembre 2023 et reste supérieur à 80 % depuis lors.
75 % des personnes interrogées ont déclaré que le pays était sur la bonne voie, soit 13 % de plus qu'en septembre 2023, tandis que 15 % n'étaient pas d'accord. L'enquête a également montré que 73 % des personnes soutiennent l'action du gouvernement russe et 21 % la désapprouvent.
« Le message de Poutine est essentiellement que tout avenir pour le pays a besoin de lui, alors que la confrontation avec l’Occident s’intensifie », a souligné Greene.
Thanh Tam (Selon WSJ, CNN, Reuters )
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