Le conflit en Ukraine aide l'Europe à échapper au « piège » du gaz russe, mais les risques demeurent

Báo Quốc TếBáo Quốc Tế25/02/2024

Deux ans après le lancement par la Russie d'une opération militaire spéciale en Ukraine, l'Europe semble s'être partiellement libérée du « piège » de la dépendance au gaz russe.
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Les pays européens consomment de moins en moins de gaz, qu’il provienne de Russie ou d’autres sources. Image d'une centrale thermique à Garzweiler, en Allemagne. (Source : AFP)

La Russie est déjà le premier fournisseur de gaz de l’Europe, représentant plus de 40 % des importations totales du continent (et même 60 % pour l’Allemagne). L’Union européenne (UE) s’appuie depuis longtemps sur cette source d’hydrocarbures pour se chauffer, faire fonctionner ses usines ou encore produire de l’électricité.

Cependant, deux ans après le début du conflit en Ukraine, les cartes semblent avoir été redistribuées.

À ce jour, l’UE consomme encore environ 15 % du gaz russe (8 % par gazoduc, 7 % par bateau) et cette source d’énergie n’a fait l’objet d’aucune rétorsion commerciale. Mais ces derniers mois, le prix de ce type d’énergie est tombé à des niveaux très bas, proches des niveaux d’avant-crise.

Pour une raison quelconque, depuis le début de 2022, les pays européens consomment de moins en moins de gaz, qu’il provienne de sources russes ou d’ailleurs.

Selon Phuc-Vinh Nguyen, expert de la politique énergétique européenne et française au Centre de l'énergie de l'Institut Jacques Delors, bien que n'étant pas soumis à des sanctions, le conflit en Ukraine a profondément modifié la relation entre les pays de l'UE et le gaz - qui est considéré comme une « arme » géopolitique importante.

L’Europe a obtenu des résultats impressionnants

Selon un nouveau rapport publié par l'Institut d'économie de l'énergie et d'analyse financière (IEEFA), la demande réelle de gaz de l'UE a chuté de 20 % depuis le conflit à grande échelle entre la Russie et l'Ukraine. Il s’agit du niveau le plus bas depuis 10 ans, les plus fortes baisses ayant été enregistrées en Allemagne, en Italie et au Royaume-Uni (hors UE).

Fin novembre 2023, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) soulignait que la crise ukrainienne marquait un tournant important pour la consommation de gaz en Europe et que la demande de la région allait encore baisser.

Les données de l'Institut Bruegel contribuent également à le confirmer, montrant que la demande de gaz en Europe a diminué de 12% en 2022, puis de 18% et 20% au premier et au second semestre 2023, respectivement, par rapport à la période 2019-2021.

Tout d’abord, cette réduction « impressionnante » de la consommation dépasse l’objectif fixé par l’UE après le conflit en Ukraine.

En juillet 2022, les États membres ont convenu de réduire volontairement leur consommation de gaz de 15 %, contre une moyenne de 5 % entre août 2022 et mars 2023. En France, la consommation nationale de gaz devrait ainsi baisser de 25 % entre le 1er août 2023 et le 18 février 2024 par rapport à la même période en 2018 et 2019.

Bien entendu, le conflit en cours n’est pas la seule raison du déclin de la demande de gaz en Europe.

Selon l'expert Phuc-Vinh Nguyen, il existe également des facteurs cycliques liés à la météo. Par exemple, les deux derniers hivers en Europe ont été exceptionnellement doux, considérés comme les « alliés chanceux » de l'Europe.

En outre, la connectivité croissante des énergies renouvelables joue également un rôle, car l’un des défis est de réduire l’utilisation des combustibles fossiles (y compris le gaz) en Europe.

L’opération militaire spéciale en Ukraine ne fait qu’ajouter une question importante à prendre en compte, qui prend désormais le pas sur la question climatique. Il s’agit d’une question de souveraineté énergétique dans un contexte géopolitique complexe.

M. Thierry Chapuis, responsable du secteur économique du groupe de distribution de gaz GRDF (France), a commenté que "comme l'électricité, le conflit en Ukraine a rendu le gaz beaucoup plus cher", obligeant de nombreuses personnes à envisager de l'utiliser en complément d'autres énergies.

Un autre risque

En septembre 2023, la demande européenne de gaz a été inférieure de 22% à la moyenne 2019-2021, en raison principalement d'une baisse de 43% de la consommation des ménages en Allemagne contre une baisse de 25% en France, ainsi que d'une forte baisse de l'utilisation du gaz dans la production d'électricité en France, en baisse de 46% contre une baisse de 16% en Allemagne.

Ces derniers mois, les Allemands ont pris des mesures pour électrifier les systèmes de chauffage des maisons qui dépendent encore largement des hydrocarbures.

Pendant ce temps, la France pourrait s’appuyer davantage sur les centrales nucléaires pour fournir une électricité à faible émission de carbone après les pannes de 2022.

Les experts estiment qu’il reste à voir dans quelle mesure les producteurs industriels ont été contraints de consommer moins.

Selon les données de Bruegel, la demande de gaz dans ce secteur a en effet diminué de manière significative, de 22% en moyenne en septembre 2023 par rapport à la période 2019-2021 (une baisse de 19% en France et de 25% en Allemagne).

Mais comme dans d’autres secteurs, il n’est pas facile de distinguer ce qui conduit à une meilleure efficacité énergétique (sans affecter la production) et ce qui peut être lié à un « slack de la demande » (les industriels réduisant ou arrêtant la production parce que l’énergie devient trop chère ou trop volatile).

Une question se pose : la demande industrielle européenne est-elle structurellement endommagée, notamment en Allemagne, plus touchée qu’en France ? Le pays paie le prix de sa dépendance au gaz russe, ce qui pourrait également être un problème pour l’UE, car il est le moteur économique du bloc.

Une autre question qui se pose est : quand cette baisse de la demande va-t-elle s’arrêter ? En d’autres termes, s’agit-il d’un mouvement fondamental ou l’Europe doit-elle encore s’attendre à une reprise avec un retour aux plus bas ?

En fait, les prix continuent de baisser.

A l'inverse, si la consommation de gaz continue de baisser, l'Europe est confrontée à un autre risque : les surcapacités des terminaux d'importation de gaz naturel liquéfié (GNL) transporté par bateau, que 27 pays construisent actuellement en masse sur leurs côtes pour compenser le volume de gaz importé par gazoduc depuis la Russie.

Depuis février 2022, l’Europe a mis en service un total de 36,5 milliards de mètres cubes (mmc) de nouvelles capacités et prévoit d’augmenter sa capacité d’importation de GNL de 106 mmc au cours de cette décennie.

Fin octobre 2023, l’IEEFA a averti que cela porterait la capacité totale de l’UE à 406 mmc d’ici 2030… soit près du triple de la demande de GNL à cette date.



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